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ABBAYE DE CLUNY - DE L'ASCENSION A LA DESTRUCTION
Saccagée a la révolution, puis démontée et vendue pierre par pierre, celle qui fut longtemps la plus grande église de la chrétienté, ne nous est parvenue qu'à l'état de vestiges.
C’est en septembre 909 que commence l’histoire de l’abbaye de Cluny. Par une charte rédigée aux assises de Bourges, Guillaume Ier dit le Pieux (duc d’Aquitaine et comte de Mâcon et de Bourges), donne « la villa de Cluni et toutes possessions attenantes » à Bernon, abbé de Baume-les-Messieurs (Jura). A la demande de Guillaume, Bernon y fonde un monastère de douze moines, selon la règle de saint Benoît, et consacré aux apôtres Pierre et Paul.
Façade du pape Gélase II
Complètement néophyte à cette époque (2020), je n'étais pas encore entrée dans les ordres clunisiens.. je me réjouissais de voir un si beau batiment préservé.... la suite dira que j'allais surtout visiter des ruines.
A cette période, la France est sous la dynastie carolingienne, mais l’autorité royale est affaiblie. L’Eglise est prise dans le système féodal, en particulier au travers de la dîme, cet impôt que les paysans doivent aux abbés. La crise est également morale, la règle de St Benoît est délaissée, ce sont des laïcs qui choisissent les abbés parmi les riches familles. La charte fondatrice de Cluny permet précisément à l’abbaye d’être directement rattachée au Pape, et permet à ses moines de désigner eux-mêmes leur abbé lorsque Bernon décèdera. Les moines de Cluny s’engagent à la miséricorde envers les pauvres, les indigents, les étrangers et les voyageurs.
La construction de Cluny III débute vers 1080 sous l'abbatiat de Hugues de Semur. L'expansion de l'Ordre, le nombre de moines sans cesse croissant assistant aux offices, et les chantiers imposants ouverts dans toutes les abbayes rivales, voire de simples prieurés, rendent obsolète l'abbatiale de Maïeul, décrite comme « bergerie étroite et vétuste » dans la Vie de saint Hugues par Geilon vers 1115. En 1088 a lieu la pose symbolique d'une première pierre. En 1095, le pape Urbain II consacre deux pierres d'autel et trois chapelles au milieu du chantier.
Le plan de l'édifice est en forme de croix archiépiscopale : il y a deux transepts. Le grand transept, dont un bras subsiste aux trois quarts, est long à lui seul comme une petite cathédrale. Il est surmonté de trois clochers : le « clocher de l'Eau bénite » surplombera jusqu'à nos jours le bras sud.
La période révolutionnaire est fatale à l'ensemble des édifices monastiques et particulièrement à l'abbaye de Cluny.
Le 29 juillet 1789, une bande de révolutionnaires incendie plusieurs demeures seigneuriales des environs et, arrivée à Cluny pour incendier l'abbaye, est repoussée par la milice des habitants de Cluny. Les bâtiments de l'abbaye sont laissés ensuite sans entretien et vidés de leur contenu, les cloches sont décrochées en 1793, les mausolées et les statues de l'abbatiale sont vandalisés. Les grilles sont brisées, les statues en bois, les peintures, les archives sont brulées. Avec le rétablissement du culte, en février 1795, la commune et les habitants de Cluny souhaitent la conversion de l'abbatiale en église paroissiale et celle des autres bâtiments de l'abbaye en fabrique . Mais ils ne sont pas entendus par l'administration et les ventes de bâtiments commencent en 1797 pour se poursuivre jusqu'en avril 1798.
Cette photo est prise a la place du porche de l'abbaye.
L'abbatiale est achetée par une bande noire de Mâcon pour 2,14 millions de francs en assignats, équivalant avec l'inflation à 50.000 francs de 1790, et sa démolition commence en juillet 1798. En août 1800, l'abbatiale est visitée par Alexandre Lenoir qui se préoccupe du sort du mausolée du cardinal de Bouillon, abbé de Cluny sous Louis XIV. Frappé par l'ampleur et la singularité de l'abbatiale, Alexandre Lenoir intervient auprès du ministre de l'intérieur, Chaptal, en faveur de sa conservation. En novembre 1800, Chaptal ordonne au préfet de suspendre la démolition. Malgré un arrêté du préfet renouvelé en juin 1801, la démolition de l'abbatiale se poursuit, en commençant par l'ouverture d'une rue à travers la nef.
Le 8 mai 1810, on fait exploser la façade et le grand portail. L'abbaye sert de carrière de pierres jusqu'en 1813 pour les maisons du bourg. Il ne reste plus, de nos jours, que 8 % de l'édifice initial.
Avec cette maquette, nous découvrons ce qu'était Cluny III au temps de sa splendeur.
Ce qui apparait en clair concerne tout ce qui a été déconstruit, en foncé ce qui reste debout a ce jour.
La façade avec ses deux tours appelées Baraban. c'est l'endroit ou a été prise la photo 6.
Pendant les quarante années d'abbatiat de saint Mayeul, ses liens avec le Saint-Empire favorisent l'extension de l’Ecclesia cluniacensis vers l'est. Mayeul est certainement l'un des conseillers écoutés d'Hugues Capet, duc puis roi des Francs, ce qui lui permet de réformer des monastères et d'y placer des abbés réguliers. Enfin, il poursuit les relations qu'Odon avait nouées avec la papauté. Sous l'abbatiat d'Odilon de Mercœur (994-1049), Cluny devient un seigneur et obtient un privilège d’exemption octroyé par le pape Grégoire V en 998. Ce privilège, qui permet à l'abbaye d'être indépendante de l'évêque de Mâcon, est prolongé par Jean XIX en 1024.
L'abbatiat de Pons de Melgueil (1109-1122) est marqué par les crises internes de l'ordre clunisien, dues à la concurrence de l'érémitisme et de nouveaux ordres (cisterciens et chartreux). À son apogée, l'Église de Cluny compte environ 10 000 moines répartis dans 1 200 établissements répandus depuis le nord de l’Angleterre jusqu'à l’Espagne, en passant par l'Italie et le Saint-Empire romain germanique.
Cluny est aussi un centre d'études de premier ordre. Le droit romain est resté vivant par l'étude de fragments de textes juridiques datant du règne de Justinien Ier. Les thèses néoplatoniciennes y survivent et nourrissent la réflexion sur l'organisation de la société. Les chapiteaux du déambulatoire de l'abbatiale de Cluny III figurent les arts libéraux, autrement dit les disciplines enseignées au Moyen Âge. Enfin de l'abbaye sortent des personnages éminents tels que le pape Urbain II.
nous entrons par le bâtiment dit du "Pape Gélase" pour la visite guidée, pour nous retrouver dans le cloitre
et dans les bâtiments conventuels qui avaient été préservés lors de la Révolution
En 1926, l'archéologue américain Kenneth John Conant commence ses recherches sur l'abbatiale. À partir de 1927, il reprend les fouilles menées avant la Première Guerre mondiale par Edmond Malo, architecte en chef des Monuments historiques pour la Bourgogne. Ses fouilles se poursuivent jusqu'en 1950, financées par la Medieval Academy of America. Conant publie sa monographie avec les dessins de restitutions en 1968. À propos de cet édifice, il écrit que « c'était un témoin de l'art roman supérieur à tout autre ». Dès 1938-1940, une maquette est réalisée à partir des hypothèses de Conant : les parties disparues sont restituées en volume au moyen d'une armature métallique. Cette maquette est exposée à la Cité de l'architecture et du patrimoine, dans la section consacrée à la Bourgogne romane.
Dans mon prochain article nous verrons ce qui reste de ce fabuleux édifice, soit 10 %
a Bientôt.
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Commentaires
holala, je ne pensais pas qu'elle avait été détruite à ce point!!!! que de dégâts à fait cette révolution, c'est triste. merci pour ces explications. ici on a eu un ciel d'orage... mais pas d'orages, juste trois gouttes de pluie, pas assez pour la nature. gros bisous. cathy
Bonsoir mouneluna , triste de voir ça, démolir un si beau monument, merci pour les photos et infos je ne savais pas tous ça ??? Bisous belle soirée à+Coucou Moune,
Un billet très complet tant sur les photos que sur les explications.
Triste ces ruines, mais rien n'est éternel... il faut bien s'y résoudre.
En tous cas, c'était très instructif, merci.
Bises et bonne soiréeBonjour Moune,
Merci pour toutes ces explications, je l'ai visit" il y a si longtemps que je n'ai pas de souvenirs. C'est une nouvelle découverte pour moi. Bonne soirée. Bisous. Huguette
il y a tellement de beaux bâtiments a préserver, que le coût doit être très élevé pour les communes....en tout cas celui là le mérite....passe un belle journée
Bonjour Moune
Je suis passé à plusieurs reprises à Cluny, que ce soit en voitire, en camping-car et même à pied à l'occasion d'un long trek de Vézelay à la vallée de la Maurienne et j'y retournerai le mois prochain lors de la sortie annuelle de mon club photos.
Bonnes explications agréablement illustrées dans cet article.
Bises
Cette abbaye a été à l'origine d'un déployement du mouvement des réformes de l'Eglise et cela dans toute l'Europe. C'est ce que tu dis dans ton texte mais j'en rajoute car j'avais suivi des cours sur l'histoire médiévale de Rome et c'est ainsi que l'importance de cette abbaye a été jusque dans les conseillers du pape et meme certains papes provenaient de ce mouvement.....tout cela pour dire que la connerie humaine a détruit un centre si important pour notre histoire......
Question climat ..on attend la pluie (à Rome), car dans le nord et en Ligurie (face à la Corse) cela a été la cata!!!! Bises romaines ma chère Monique
Je n'ai jamais logé dans le coin et je n'ai donc jamais eu l'occasion de visiter cette abbaye qui m'attire pourtant. J'espère pouvoir la découvrir un jour. En attendant, je fais la visite avec toi.
Bon weekend;
Bonjour Moune
C'était tellement beau et dire qu'il ne reste que peu de choses mais ton article est très instructif et tes photos belles .
Bises
Merci Monique pour cet excellent reportage, complet, précis avec de belles photos. Bonne journée. Bises
Bonjour Moune,
Ce qui reste de l'édifice ne nous donne qu'une piètre idée de ce que fut cet abbaye. Mais tes photos nous permettent cependant de l'imaginer un peu.
Bises
13moquepletMercredi 24 Août 2022 à 08:39
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Et oui je n'ai jamais eu l'occasion de la voir mais je savais qu'elle était plutôt en ruine par rapport à sa construction d'origine. Par contre son influence a été immense et nous avons beaucoup de sites dits clunisiens en Haute-Loire et dans d'autres départements...Ce que tu nous montres me plait beaucoup. Merci pour toutes ces explications. Bisous et une bonne fin de journée